Marie Kacouchia
Covid-19 - Le témoignage de Jeremi, infirmier dans le Grand Est
En France, nous avons maintenant bien entamé le deuxième mois de confinement et les journées semblent parfois s'étirer à l'infini. Compliqué d'ailleurs pour certains de résister à l'appel de l'extérieur devant des journées printanières au temps radieux.
Mais aussi difficile que soit cette réclusion, il faut rappeler qu'elle est essentielle pour ralentir l'avancée de l'épidémie de Coronavirus Covid-19 .
Dans les hôpitaux, le personnel soignant qui est à l’œuvre depuis de trop nombreuses semaines compte en particulier sur l'effort de chacun en ce sens.
Jeremi, infirmier dans le Grand Est témoigne...

Bonjour, je m’appelle Jeremi, je suis infirmier et je travaille au sein d’une unité Covid-19 d’un service de médecine infectieuse dans un hôpital du Grand-Est. Cela fait maintenant 1 mois que je suis au plus près des personnes atteintes du Covid-19 .
Quelle est est la situation dans votre région ?
Avec environ 12 000 personnes actuellement atteintes, la région du Grand-Est est la deuxième région la plus sévèrement touchée après la région Île-de-France.
En effet, c'est en Alsace que les premiers cas de Covid-19 ont été détectés, ce qui en fait le cœur même de l'épidémie. On parle aussi d’épicentre.
En France nous avons désormais passé le cap des 20 000 décès pour 115 000 personnes atteintes environ.
Quels sont les symptômes des personnes malades du Coronavirus Covid-19 ?
Il faut savoir que 80% des personnes atteintes du Covid-19 ne sont pas dans un état jugé « grave ». Pour ces dernières les manifestations sont un rhume, une fièvre voire des symptômes grippaux. D'autres encore n'ont tout simplement pas de symptômes.
Quant aux 20% restantes, les symptômes varient de la fièvre à la la perte de goût ou d’odorat, la toux, des courbatures, des céphalées, des nausées, des vomissements et des dyspnées (difficultés respiratoires).
Ces symptômes peuvent s’aggraver et tendre vers des syndromes de détresse respiratoire et entraîner le décès du patient.
Avez-vous remarqué un changement dans le profil des malades au cours des semaines ?
Le profil des malades restent sensiblement le même. Les patients les plus âgés sont les plus vulnérables ainsi que les personnes à risque avec de multiples facteurs de comorbidité : les pathologies pulmonaires chroniques, les immunodéprimés, les personnes atteintes d’insuffisance rénale et cardiaque, les diabétiques, les personnes souffrant d'obésité.
Après il faut garder en tête que le risque zéro n'existe bien sûr pas et malheureusement chacun peut se retrouver dans un été compliqué.
Quelles sont actuellement vos conditions de travail à l’hôpital ?
A l’hôpital aujourd’hui, nous avons un manque considérable de matériel en premier lieu. Nos masques sont périmés (certains depuis 2011), nos gants ne sont pas tous testés sur les virus, nous réutilisons nos blouses à usage unique, nous manquons de solution hydro-alcoolique... Voilà les conditions difficiles dans lesquelles nous évoluons chaque jour.
Par ailleurs, nous sommes en "Plan Blanc", ce qui signifie que chaque professionnel de santé peut être réquisitionné à tout moment si nécessaire.
Quel est l’état d’esprit actuel de votre équipe ?
Je ne peux pas parler au nom de toute mon équipe ou de l’équipe soignante en générale car nous sommes tous différents et la situation ne nous impacte pas tous de la même façon. Ce que je peux dire cependant, c'est que nous essayons de garder un état d’esprit "positif " en dépit du manque de moyens qui nous expose lors de la prise en charge des patients.
Nous faisons de notre mieux pour apporter tous les soins nécessaires aux patients avec les moyens dont nous disposons. Après il ne faut pas nier qu'une certaine fatigue psychologique mais aussi physique s'installe du fait du rythme de travail.
Comment la nouvelle de la prolongation du confinement a-t-elle été accueillie ?
Rester chez soi n’est pas spécialement une nouvelle agréable, surtout après plus d’un mois de confinement. Ceci-dit, au regard de l’évolution de l’épidémie, nous personnel soignant le prenons comme une nouvelle opportunité d’endiguer cette épidémie.
Pourquoi rester chez soi est-il vital ?
Il est important de rester chez soi car le confinement permet de faire reculer cette épidémie. En fait, ce sont les personnes dites « asymptomatiques » (ne présentant pas de symptômes) qui sont les plus dangereuses car elles transportent le virus sans le savoir et peuvent le transmettre à n’importe qui. Les gestes barrières sont essentiels mais le confinement l'est aussi. Flâner au grand air est un vrai plaisir certes mais cela n'est pas vital. Si chacun s'efforce de respecter le confinement, l’épidémie évoluera vers sa fin.
Quelles recommandations faites-vous à nos lecteurs ?
Même confiné.e.s l'hygiène doit rester une priorité. Lavez-vous les mains très souvent et au besoin utilisez une solution hydro-alcoolique. Aussi, ne sortez de chez vous qu'en cas de réelle nécessité. Portez un masque et respectez au moins 1 mètre de distance avec les autres.
Quel message souhaitez-vous aujourd’hui faire passer ?
Je demande à chacun d'être responsable et de respecter les mesures gouvernementales. Nous n'adhérons peut-être pas tous au parti politique majoritaire mais cela ne doit avoir aucune importance. Nous devons aussi pour le moment faire fi des manquements tels que les pénuries de matériel qui se produisent car c’est ensemble que nous allons vaincre la maladie.
Pensez aussi à nous les soignants car nous ne sommes pas des héros invincibles. Nous faisons notre métier et à travers vos agissements vous pouvez nous mettre en danger puisque nous sommes en première ligne.
Et enfin je dirais, prenez soin de vous et vos proches !